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auditorium by Julien Fernandez
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Actualités

Episode 6 : les grands airs classiques et lyriques dans l'électro

02/06/2020

Notre série : les grands airs classiques et lyriques dans les musiques actuelles

La musique classique et les grands airs d’opéra ont inspiré de nombreux groupes et artistes d’univers différents : rock, pop, électro ou encore rap, hip-hop… Certains airs ont été repris à l’identique, d’autres ont été samplés. Les plus spectaculaires servent encore aujourd’hui à l’entrée en scène d’artistes internationaux. Ces reprises, plus ou moins évidentes à reconnaître, ont parfois contribué au succès et à la renommée des musiques actuelles les empruntant, parfois amené les plus curieux à explorer les originaux.

Sauriez-vous reconnaître les extraits classiques repris dans ces musiques ? A travers différents épisodes thématiques, nous vous proposons d’explorer toutes ces associations entre l’univers classique et les musiques actuelles.

 

Épisode 6

Un petit côté Inception dans les alliances électro-classiques


Le répertoire classique : une source d’inspiration abondante pour les artistes électro.

Les associations entre la musique classique et les différents genres de l’univers électro (trance, techno, House, Dance…) ne sont plus une nouveauté. De nombreux artistes de musiques électroniques veulent créer des passerelles entre les deux mondes comme les Rondo Veneziano, alliant la musique baroque et la Dance. Un mélange qui a inspiré plus tard Daft Punk pour le titre Veridis Quo sur l’album Discovery.

Pour créer leur mix, les artistes électro puisent sans fin dans le vaste répertoire de la musique classique. C’est le cas de William Orbit, figure de la House music anglaise. Ce dj propose une relecture des œuvres de Beethoven, Vivaldi, Ravel… dans son album Pieces In A Modern Style. Sa reprise de l’Adagio pour cordes op.11/Barber a été samplée par la suite en version trance par Ferry Corsten. Une œuvre classique qui a fait l’objet de nombreux autres remix : celui du DJ Tiësto ou encore la version trance de Laurent Wolf en 2004 sous le titre Adagio for Strings.

Le groupe Justice utilise des notes d’Une nuit sur le mont chauve de Moussorgski dans leurs titres Genesis et Stress. Giogio Moroder et Brian Evans se permettent de réarranger La Lettre à Élise/Beethoven dans leur litre Lonely Lovers. La Cinquième Symphonie de Beethoven a été samplée par Walter Murphy and the Big Apple Band, puis de nouveau remixée par Soulwax dans A fifth of Beethoven. Les artistes Roudoudou et Jay-Jay Johanson proposent chacun leur propre version électro de Summertime, air célèbre de l’opéra Porgy and Bess/Gershwin, avec comme référence la célèbre reprise du duo Ella Fitzgerald et Louis Armstrong.

 

Quand le mélange classique-électro devient plus institutionnel.

D’autres artistes électro cherchent à aller encore plus loin dans le mariage entre les deux genres. Ils se réapproprient complètement les airs classiques, offrant ainsi un nouveau regard sur ces œuvres. Le groupe Nova Nova (formé en 1992 par Michel Gravil et Marc Durif) réuni dans leurs compositions le classique et la House. Max Richter (auteur notamment de la B.O. du film Shutter Island de Martin Scorsese) recompose Les 4 saisons de Vivaldi dans le cadre d’un projet de réécriture d’œuvres classiques, initié par le label Deustche Grammophon. On peut citer aussi le travail de Wolfgang Voigt, d’Ulrich Schnauss ou de Sébastien Tellier sur l’album Re:work où chacun propose sa réinterprétation d’une œuvre classique.

Le dj Fernando Corona alias Murcof retravaille la Marche de la Cérémonie Turque/Lully dans son titre Lully’s Turquerie extrait de son album The Versailles Sessions. Cet artiste participe à de nombreux projets associant l’électro et le classique tel que l’album Private Domain initié par Iko ou encore Statea, album en collaboration avec la pianiste Vanessa Wagner. Cet opus rend hommage aux œuvres des maîtres du répertoire minimaliste (John Cage, Philip Glass, Arvo Pärt…). Un répertoire cher aux compositeurs de musiques électroniques, conscients de l’influence de ces œuvres sur la naissance de leur genre. En effet, le principe de boucles répétitives, essence même de la musique électro, est un héritage de la musique classique minimaliste du XXe siècle. Les compositions de Philip Glass, la pièce In C/Riley ou les œuvres de Pierre Boulez ont favorisé le développement des musiques électroniques actuelles. On n’oubliera pas non plus de citer le Boléro/Ravel qui a certainement influencé la musique répétitive.

 

Des artistes et orchestres classiques initiateurs de projets avec la musique électronique.

Certains musiciens classiques s’aventurent aussi dans l’univers électro comme les pianistes Vanessa Wagner ou Francesco Tristano. Artiste talentueux, Francesco Tristano est connu pour ces associations audacieuses et sans limite. Il réinterprète des œuvres classiques en les transposant dans d’autres univers tels que l’électro comme lors de sa carte blanche à l’Auditorium de Bordeaux en novembre 2018 dans le cadre du Festival l’Esprit du Piano. Le pianiste Bruce Brubaker a lui monté un projet avec le producteur électro Max Cooper autour des œuvres de Philip Glass : Glassforms. Entre dialogues et improvisations, ces deux artistes expérimentent une nouvelle musique surprenante (concert donné à l’Auditorium le 16 novembre à l’Auditorium dans le cadre de l’Esprit du Piano).

Les collaborations s’enchainent entre les producteurs électro et diverses formations classiques comme celle entre la Maîtrise de Radio France et le dj Rone qui revisitent ensemble les œuvres de Britten, ou bien les compositions électro-classiques pour orchestres du dj Kevin Rodriguez, alias Worakls. Des compagnies de danse demandent aussi à des dj de retravailler des œuvres classiques pour leurs pièces chorégraphiques. La Cie Rêvolution d’Anthony Egea pour son spectacle Les Forains, ballet urbain (dansé en juin 2018 au Grand-Théâtre de Bordeaux) a collaboré avec le dj Frank II Louise pour ajouter des sonorités plus électroniques à la musique du ballet Les Forains, composée par Henri Sauguet.

Des orchestres symphoniques prennent part aussi à des projets mariant musiques symphoniques et compositions électroniques comme le projet Versus de Carl Craig (il devait se produire sur la scène de l’Auditorium ce 28 mai avec l’Orchestre National Bordeaux Aquitaine). On peut citer également le projet Light from the Outside World de Jeff Mills avec l’Orchestre National du Capitole de Toulouse en 2016. Cet artiste avait proposé l’année suivante à l’Auditorium de Bordeaux un concert en duo avec le saxophoniste Emile Parisien.

Enfin, les compositeurs classiques s’essaient également à l’ajout d’effets électroniques dans leurs compositions. Pour exemple, la Techno-parade pour flûte, clarinette et piano de Guillaume Connesson ou la symphonie Asyla op.17 de Thomas Adès. Cette pièce est particulièrement connue pour son 3e mouvement Ecstasio présentant des aspects électro.

Difficile d’être exhaustif, pourtant voici notre playlist ultime des titres électro qui n’auraient jamais existé sans les grands compositeurs. 

 

#CultureChezNous

 

Pour aller plus loin :

La vidéo de Pedro Winter, compositeur-producteur français de musique électronique et manager de Daft Punk durant plus d'une décennie.

Article : Musique classique et l'électro : les noces rebelles